En novembre 2006, dans le cadre de notre chantier « Les invisibles », nous avons rencontré Evelyne Perrin qui est socioloque et militante, notamment à Stop précarité.
Attention, notre compte rendu n’a pas été relu par Evelyne Perrin et peut donc comporter des erreurs.
Le Compte rendu
Stop Précarité compte une dizaine de personnes.
Un de leur mot d’ordre: « Il faudrait faire de la précarité un vrai enjeu politique »
Il y a parmi les précaires beaucoup de jeunes diplômés mais qui ne connaissent pas leurs droits (le droit du travail n’est enseigné ni en fac ni en lycée). Stop Précarité a eu l’idée de fabriquer un petit livret contenant les bases du droit du travail.
La précarité touche de plus en plus de gens. les patrons ont un intérêt à cela, ça casse la combativité et rend les gens dépendants.
Le nombre de chômeurs est officiellement de 3,5 Millions mais au moins 2 millions de personnes ne sont pas inscrites à l’ANPE car elles savent qu’elles ne toucheront rien (pas d’assedics). La moitié des
chômeurs ne touchent plus d’allocations.
6 millions de personnes dépendent des minimas sociaux
Mais il y a également les précaires plus favorisés: CDI chez Mac-Do ou Pizza Hunt par exemple, les très diplômés qui surfent d’un emploi à un autre…
Dans l’automobile il y a de plus en plus d’intérimaires, et embauchés à vie (chez Airbus on vire en ce moment tous les intérimaire, c’est pratique).
Ce sont les fins de CDD et les intérimaires qui forment le gros des entrées au chômage.
8 emplois sur 10 sont des CDD d’un mois ½ !
Les sans-papiers souvent ne sont pas payés ou très mal. Quand ils ont des problèmes de santé, un accident du travail, ils ne bénéficient d’aucune aide, aucune indemnisation
L’économie a besoin de ces travailleurs et pourtant les laisse dans la précarité car exploitables et corvéables à merci.
Les syndicats (sauf la CGT) défendent mal (ou pas) les précaires et chômeurs. C’est une masse invisible car fragmentée, chacun est chez soi, isolé. S’occuper d’un précaire est difficile car une fois syndiqué, 3 mois plus tard, il change de boîte, de boulot.
Mac-Do et Cie:
Les « franchises » permettent aux marques (Pizza Hunt, Mac Do) de se libérer des contraintes sociales et des risques financiers qui reposent uniquement sur le gérant (qui paye pour utiliser la marque).
Action au Mac Do des Champs Elysées: blocage de l’entrée un samedi pour interpeller les gens sur le cas de 5 jeunes employés qui parce-qu’ils voulaient monter un syndicat ont été accusés de vol.
Aure grève d’un an cette fois, blocage d’entrepôts qui livrent Mac-Do, occupation de plusieurs Mac-do, confection de tee-shirt « beurk »
Ils ont gagné, Mac Do a payé les 5 employés pour qu’ils partent !
Femmes de ménage travaillant dans les hôtels du groupe Accord
Novotel, Mercure, Ibis etc appartiennent tous au groupe Accord, qui sous-traite le ménage à la société Arcade.
La sous-traittance crée de l’intermédiaire, cela dégrade forcément les conditions de travail et de rémunération des salariés.
Les femmes de ménage n’ont pas le droit de manger dans la journée, sont payées à la chambre (et non à l’heure) et signent un contrat en blanc qui est rempli ensuite.
Grève soutenue par le syndicat SUD (pas par la CGT) pour qu’elles soient payées sur la base de leurs heures de travail et pour une réduction des cadences: occupations des halls d’hôtel, pique-nique, prospectus… pendant 1 an
Blocage des péages d’autoroute, concerts de soutien, et au bout du compte, victoire : réduction des cadences, meilleure prise en charge de leurs heures de travail. Elles sont toujours à temps partiel mais avec des heures en plus, payées supplémentaires.
Le recrutement et l’exploitation de ces femmes (africaines pour la plupart) est d’autant plus facile qu’elles ne savent pas lire.
Arcade, par vengeance, a licencié une des femmes (Fati) un an après les événements, pour une histoire de quota dépassé des heures syndicales. Plusieurs recours ayant échoué, tous les vendredis, pendant un an ½, Stop précarité a occupé les hôtels Accord de Paris et la banlieue. Accord a craqué et a donné des consignes à Arcade. Arcade a dédommagé Fati
Débat avec tous:
– Aude: On peut lutter un an parce-qu’il y a rencontre, dynamique, élan autour d’un noyau.
– Yves: Hiérarchie entre permanents et intérimaires, rivalités même, encouragées souvent par les employeurs, alors qu’on est dans le même bateau… Même quand les normes de sécurité ne sont pas respectées, il vaut mieux ne pas s’opposer, le client est roi.
– Liliane: responsabilité quand même de celui qui sous-traitte, qui se décharge souvent sur l’entreprise de sous-traittance concernant les conditions de travail.
– Yvette: comment faire pour que les gens croient en la lutte, en la lutte qui dure, et croient à un résultat possible ?
Comment faire pour combattre les luttes de chapelle (des assos, des syndicats) ?
– Véronique: Y-a-t-il des luttes pour soutenir les RMIstes – problèmes des 3 mois durant lesquels ils ne touchent rien. Les minimas sociaux sont plus confortables que travailler par intermittence.
Réponse: pas d’asso pour les RMIstes, et dans les assos, membres vieillissants, pas de jeunes. c’est inquiétant pour l’avenir.
– Willy: Il y a les gens qui aiment l’argent et les gens qui aiment la vie. D’où vient cette force pour lutter ainsi ?
Réponse: sentiment de mener un combat juste et envie de ne pas lâcher l’affaire (aller jusqu’au bout). Dignité retrouvée dans la lutte. Une énergie retrouvée dans les grands combats (CPE, banlieues, marche des jeunes de Clichy…)
– Les patrons organisent le chômage
Autre action de Stop Précarité: les revendications
Une Fnac a ses employés moins bien payés que les autres fnacs, grève pour demander la possibilité de passer de CDD à CDI, de tps partiel à tps plein.
Réflexion pour bâtir une plate-forme pour des revendications communes – un statut de vie sociale et professionnelle: donner des allocations à tout le monde, des droits sociaux, un droit à la retraite. La carrière continue de se dérouler même si on a plus de travail.
Réflexion prévue à partir de mars 2007 entre le MEDEF et les syndicats concernant, entre autre, une remise à plat de l’assurance chômage, la révision du code du travail.
Allemagne: indemnisation très courte (1 an) – Schroëder
Danemark: flexibilité et sécurité: rotation sur le marché du travail et sécurité financière. Les gens sont pris en charge pendant 4 ans à 90% de leur salaire. 90% de gens sont syndiqués. Il y a un fort consensus social.
Belgique: Même si on a jamais travaillé, il existe des minimas sociaux (plus élevés qu’en France)
Reprise du débat:
– Emy: notre principale action est notre façon de consommer, consommer intelligent.
– Lilianne: se donner le droit d’ingérence sociale. C’est notre devoir de citoyen. Droit à dire: « Je veux vivre dans un autre monde »
– Fab: comment toucher les Rmistes pour les aider, les mobiliser ?
Réponse: dans les banlieues se créent des assos qui maintenant font de la politique. les jeunes découvrent grâce à elles d’autres moyens de revendiquer qu’à travers la violence.
– Les comités de soutien sont mal vus par les syndicalistes, sur le terrain. Rivalité et méfiance.
Bonjour,
Je connais Evelyne Perrin, j’ai été sa secrétaire c’est une femme remarquable. Elle est toujours préoccupée à faire reculer les injustices. Elle est une « bosseuse ». Notre pays qui a vu une forte progression du front national doit être très attentif. Les droits reculent car il y a une forte pression des forces de l’argent au détriment de l’humain.
J’adhère au combat mené par vous, et je vous soutiens fraternellement.
T. Pons